samedi 26 janvier 2013

Rencontre et défi

   Le souvenir de cette après midi m'accompagne toujours, prêt à jaillir au moindre lys croisé, espérant à chaque incursion dans le monde parfumé trouver un écho...
   Ce monde parfumé commence pour moi dès les jardins, souvent parsemés d'Alysses odorantes à la divine odeur miellée, parfois si acre que j'ai pu entendre à son encontre un fameux "ça sent la pisse" ; les jardineries aussi d'où je ressors ivre de gardénia narcotique, le nez jauni de mille pollens, des papiers griffonnés plein les poches ; puis l'atelier de restauration de tableaux, juste en bas, qui baigne la cour d'huile et de térébenthine ; sans oublier internet, ses forums, ses sites, ses blogs...




celui qui a tué des chaussures...
   Et bien sûr il y a les parfumeries où, exposées sans pudeur, se dégustent toutes sortes de jus.
  Je les arpente parfois un peu à la façon de salles d'exposition, de galeries d'art ou même de sites archéologiques : dénicher, dans une petite boutique perdue, la dernière boite poussiéreuse d'un jus tant espéré, devenu introuvable ou tout simplement défiguré depuis une reformulation bancale, est un moment de plaisir absolu valant largement l'agonie d'une paire d'escarpins sur d'improbables pavés hostiles !!!

   Bien souvent ce sont les temples de niche parisiens qui offrent refuge à mon vice. Je passe et repasse inlassablement, le nez aux aguets, soupirant d'aise ou d'ennui...
   A force de passages et au gré des rendez-vous, les rencontres se font, les mots s'échangent, les passionnés se dévoilent.
   Alors inévitablement un jour, sous le soleil de juin, j’évoque cette Garde et ce Lys qui me hantent, ce parfum recherché qui en porterait la trace et que je ne trouve pas : celui-ci trop étouffant, trop frais, trop fleuri, trop fraise, celui là manquant de corps, de personnalité, de foin... Je parle, je parle, je parle et construit mon idéal entre hussard et fleurs blanches.

   C'est là qu'une phrase magique s'est posée dans la conversation : " Et si on essayait ? "
Lancée comme un challenge...
  " Ecrivez l'histoire, faites parler les émotions et les images, toutes les notes que vous avez en tête et on verra bien, juste un flacon, pour l'aventure ! "

** Ici devraient donc se trouver 18 lignes sur mon état à ce moment là : plus excitée qu'une fan de Justin et noyée dans un sourire indécrochable, à faire pâlir celui d'une vendeuse de télé achat, est un sans doute  un bon résumé **

Le pari d'une fiole rien que pour mon nez vient de se profiler...

   A quoi je pense ? Me précipiter chez moi et noircir du papier pour que cette idée ne puisse plus s'échapper ! Réussir à décrire le plus précisément cette odeur croisée, disséquer chaque note, chaque élément, chaque instant, suivre l'évolution à la molécule près...
   Mais devant le papier l'éternelle question du coucher de soleil ultra réaliste en peinture se pose : magnifique dans la nature, c'est étrangement tarte et froid sur toile. Parfum et odeur sont-ils du même combat? Oui, définitivement oui : l'odeur d'une rose peut être sublime mais sa restitution exacte et dépouillée en parfumerie m'ennuie à mourir... On peut certes reconnaître la maîtrise, mais sans émotion, sans histoire, sans personnalité, je m'en contrefous!!! Sans regard subjectif, copier la nature devient insipide...
Quel lys choisir?
   Et finalement j'ai depuis si longtemps mis à plat cette odeur, que déjà l'esquisse transformée se dresse, juste avec le trait du pinceau, la palette des couleurs, juste avec ma vision qui se superpose à la réalité... J’ai le parfum d’une odeur en tete…

7 commentaires:

  1. Je suis cette aventure comme si j'étais plongée dans un roman! Merci pour ce partage...

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    1. Merci Louve, ça me fait plaisir de te savoir passer :-)

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  2. Je ne regrette pas mon incursion, vers quelle découverte nous emmenez-vous ?
    J'ai hate de suivre ce jeu de piste en dehors des sentiers battus me semble t'il !
    Antidote.

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    1. J'espère que vos incursions continueront avec plaisir, merci pour votre mot!

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    2. Que j'aime à te lire.... :-))

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    3. Ca me fait très très plaisir :-)
      Et je sais que tu compatis à mes chaussures mortes, et que tu comprends parfaitement qu'un vieil extrait du Dix en vaut la peine!

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  3. Ohhh oui je comprends/compatis/valide :-)

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